samedi 24 mars 2018

De la terre à la lune - Jules Verne

En résumé.

Faisons un voyage dans le temps et dans l'espace ! Nous sommes aux Etats-Unis, dans la deuxième moitié du XIXème siècle et la Guerre de Sécession (1861 - 1865) vient de s'achever. Le Gun Club, société regroupant des armateurs qui ont contribué à l'évolution de l’efficacité des armes américaines, notamment sur le volet de la balistique, est au chômage : la paix est revenue, plus besoin de canons ! C'est alors que le président, Barbicane est frappé d'une idée géniale. Puisque les progrès ont été considérables, pourquoi ne pas lancer un projectile sur la Lune ? Il n'en fallait pas plus pour déchaîner les foules, elles qui pensaient qu'un tel projet ne serait jamais possible. Mais ce n'est pas fini ! Alors que la construction du Columbiad (le fameux obus) est bientôt terminée, Michel Ardan, un explorateur au charisme extraordinaire, se porte volontaire pour monter à bord et être le premier homme à visiter la Lune. L'hystérie gagne le monde entier, jusqu'à l'embarquement puis le décollage.

Mon avis.

De Jules Verne, je ne connaissais pas grand chose avant de me plonger dans cette formidable aventure jusqu'à la Lune. Il y a quelques années, j'avais lu Le tour du monde en 80 jours dont je garde très peu de souvenirs. C'est une amie qui m'a prêté celui-ci et cela tombait plutôt bien car j'avais envie de redécouvrir l'univers si particulier de l'auteur depuis un petit moment.

Jules Verne, né dans le premier quart du XIXème siècle est célèbre pour être l'inventeur du roman scientifique. De la Terre à la Lune en est l'illustration parfaite. Lui qui était agent de change le jour, étudiait les sciences la nuit pour rendre ses écrits aussi réalistes que possible. En tant que lectrice qui fait autant preuve de culture scientifique qu'un têtard, je dois dire qu'on s'y voit, parmi tous ces gens qui pensent que le monde est en train de basculer parce que l'Homme a trouvé le moyen de défier les éléments physiques. La plume de Jules Verne est fabuleuse, elle nous entraîne, comme le ferait un journaliste, dans l'Histoire. Les différents tableaux défilent, tous plus réalistes les uns que les autres et on ne peut être qu'ébahi devant la capacité de l'auteur à être aussi visionnaire. Ce petit ouvrage témoigne de l'esprit de l'époque : la science va changer le monde et les hommes, la course aux progrès est lancée, désormais on ne loue plus le soldat qui tue ses congénères mais l'explorateur qui repousse les limites du possible. C'est aussi l'époque où les scientifiques ne mesurent pas les conséquences que vont avoir leurs inventions sur l'environnement. Il y a aussi cette idée que l'Homme est plus fort que la nature et qu'il peut abolir n'importe quelle contrainte, qu'elle soit spatiale ou temporelle.

Même si j'ai été convaincue par l'ensemble, je regrette les passages purement scientifiques qui sont à mon sens trop nombreux. Il y a quand même trois ou quatre chapitres qui se focalisent uniquement sur la construction de l'obus (les matériaux, la poudre qui va lui donner son impulsion, la construction du canon qui va envoyer dans l'espace le projectile). Les unités de mesure qui donnent leur précision à toutes ses considérations ne sont pas en kilomètres ni en kilogrammes mais en milles ou en lieues. Je sais bien que cela aurait été anachronique mais ce fut une autre des choses qui m'ont un peu refroidie. Heureusement, ces passages ne constituent pas l'intégralité du livre et on finit par suivre l'aventure dans son ensemble. Les passages concernant les querelles entre Barbicane et Nicholl, son rival, la façon dont ils ont réussi à lever des fonds pour financer l'entreprise ou encore le choix du territoire qui accueillera la construction de l'engin sont nettement plus intéressants et offrent une jolie représentation de ce qu'était la vie à cette époque.

Un classique que je recommande, même si certains passages paraissent ennuyeux ! Le talent de Jules Verne est à découvrir !

D'un coup d’œil, les plus, les moins.

+ Les dons de voyance de Jules Verne.
+ Les connaissances qu'il déploie - connaissances qu'il a développées en autodidacte - qui rendent cette aventure extrêmement réaliste.
+ Sa plume qui est très agréable et accessible (même si je doute qu'elle soit très adaptée pour des enfants).
+ Le thème du livre : quelle aventure !
+ En toile de fond, la fresque historique.

- Les passages purement scientifiques avec des unités de mesure qui ne permettent pas des représentations mentales

Dernières infos.

De la Terre à la Lune a été publié en 1865 et compte 247 pages. Il est suivi d'un deuxième tome, un peu moins connu qui s'intitule Autour de la Lune et paru en 1870.  

Ma note.

jeudi 15 mars 2018

Throwback Thursday - Famille

Bonjour à tous !

Le Throwback Thursday est un rendez-vous repris par Betty Rose Books sur son blog. Les consignes sont très simples: chaque Jeudi, nous devons proposer un livre en accord avec le thème que Betty Rose Books nous aura concocté. Le but est d'enrichir notre Wish List en découvrant le choix des autres Bloggeuses!

Je tiens à préciser que toutes les images liées au Throwback Thursday proviennent du blog de Betty Rose Books.
Cette semaine, le thème est Famille.

Pour l'occasion, voici le livre que j'ai choisi :

13 à table ! - 2016
Collectif
J'attendais ce thème avec impatience ! La famille est une source d'inspiration intarissable pour les écrivains. D'ailleurs, nombreuses sont les histoires construites autour d'un nœud familial. J'avais donc l'embarras du choix cette semaine mais celui qui me paraissait le plus pertinent est le 13 à table ! sorti en 2016. Peut-être connaissez-vous déjà le concept car on en voit la pub un peu partout dans les centres commerciaux ou dans les gares : les 13 à table !, publiés chaque année depuis 2015, sont un recueil de nouvelles écrites par des écrivains pour la plupart très connus et qui tournent toutes autour d'un thème qui varie selon les années. Si ces écrivains se réunissent, c'est pour la bonne cause ! 1 livre acheté = 4 repas distribués par les Restos du Cœur. L'occasion de faire plaisir et de se faire plaisir en retrouvant nos auteurs favoris !

En résumé : Si je vous présente le recueil de 2016 en particulier, c'est parce que le thème choisi pour celui-ci est les relations frères-sœurs. Les douze nouvelles donnent lieu à des histoires complètement différentes, des toutes douces aux plus coriaces. En général, ça suit le style habituel de l'écrivain. Si vous voulez avoir un aperçu de chaque nouvelle, je vous invite à jeter un coup d’œil à la chronique que j'ai écrite sur ce bouqin.

Mon avis : De façon générale, j'ai bien aimé l'ensemble. Evidemment, j'ai accroché sur certaines nouvelles, dont je me souviens encore d'ailleurs, alors que d'autres m'ont laissée un peu plus indifférentes. En tout cas, c'est amusant de voir qu'à partir d'un même thème, on a droit à des imaginaires extrêmement variés. C'est le genre de lecture parfaite pour les transports : un trajet, une histoire, pas la peine de se replonger dans ce qu'on a lu la veille au soir...

samedi 10 mars 2018

Un goût de cannelle et d'espoir - Sarah McCoy

En résumé.

Nous voici en Allemagne en 1944. La Seconde Guerre Mondiale est sur le point de s'achever mais les protagonistes de notre histoire ne le savent pas encore, alors il faut montrer patte blanche. Elsie, une jeune fille de 16 ans travaille aux côtés de ses parents dans la boulangerie familiale, alors que sa sœur les a quittés pour le Lebensborn (sorte de pouponnière nazie qui héberge les bébés aryens, destinés à un grand avenir au sein du Reich de par leurs caractéristiques physiques mais aussi leur ascendance). Un soir, alors qu'Elsie est invitée par son prétendant au bal de Noël du parti nazi, elle échappe de peu à un viol. Elle est sauvée de justesse par un enfant juif. Celui-ci, sans toit et destiné à partir pour les camps lui demande de l'héberger. Osera-t-elle prendre ce risque ?
Soixante ans plus tard, aux Etats-Unis, Elsie est patronne de sa propre boulangerie spécialisée dans les pâtisseries allemandes. Elle croise la route de Reba, journaliste pour la presse locale, venue l'interroger sur les préparatifs de Noël en Allemagne.

Mon avis.

J'ai souvent croisé ce livre sur la blogosphère, la plupart du temps accompagné d'éloges. Il n'y a qu'à voir la note que lui ont décernée 228 lecteurs sur Livraddict : 16.7 ! De façon générale, je ne raffole pas des livres historiques mais j'étais tout de même curieuse de découvrir celui-ci. Alors quand une amie a proposé de me le prêter, je n'ai pas pu refuser. Je suis ressortie de cette lecture avec un avis mitigé. Je suis contente de l'avoir lu et j'ai passé un agréable moment, sans pour autant être transcendé par ce que j'avais sous les yeux. Ici, je vous parle des points faibles du livre mais gardez à l'esprit qu'il a quand même un petit côté feel-good qui donne du baume au cœur.

La première impression que j'ai eue en tournant la dernière page est celle d'une lecture laborieuse. Trois semaines pour achever près de 500 pages ! Certes, avec la reprise de mes études, je n'ai plus beaucoup de temps pour lire mais tout de même, j'ai eu le sentiment d'une histoire interminable et longue à se mettre en place. Le livre alterne entre les chapitres consacrés à l'histoire d'Elsie pendant la Seconde Guerre Mondiale et ceux consacrés à Reba (et indirectement Elsie) dans les années 2000. Le procédé n'a rien d'original, souvent employé pour ce type de projet. Parfois c'est pertinent, parfois ça l'est moins, comme ici. Il n'y a pas véritablement de lien entre les deux histoires. Certes, on retrouve le personnage d'Elsie mais elle n'entretient que des liens superficiels avec Reba, contrairement à ce que laisse supposer l'auteur. Il n'y a pas vraiment d'échanges entre elles, on ne voit pas à quel moment les confidences prennent place et influencent Reba (qui dira à la fin du livre qu'Elsie occupe une place primordiale dans sa vie). Ainsi, il y a comme un décalage entre ce que le lecteur ressent et ce qu'il est censé ressentir. Par ailleurs, je n'ai pas vraiment compris l'intérêt de l'histoire de Reba, personnage niais et pas très intéressant qui n'apporte pas de plus-value à l'intrigue globale. Il pourrait y avoir des points communs entre les deux femmes (leur doutes quant à leur vie sentimentale, des dilemmes auxquels elles doivent faire face) mais ils sont maladroits et peu évidents. 

En fait, le problème majeur de ce livre est la multiplicité des sujets traités. L'auteur a voulu se lancer sur plusieurs pistes de narration sans en approfondir aucune. Pour vous donner une idée, sont abordés la question du Lebensborn, la protection d'un enfant juif lorsqu'on est allemand et que l'on adhère au projet du Reich, la question de la place de la femme dans ce type de régime (viol, mariage arrangé, avortement), la culpabilité qu'un soldat ressent lorsqu'il tue un de ses congénères, la difficulté d'être policier aux frontières et de briser les espoirs des migrants mexicains, le fait d'être végétarien, l'alcoolisme et la dépression d'un père et il me semble que j'en oublie. Toutes ces thèmes sont intéressants mais ils ne peuvent pas être traités de façon superficielle et au détour de quelques lignes. J'aurais donc aimé que l'histoire d'Elsie étant jeune - la partie la plus pertinente - fasse l'objet de plus de profondeur et de réalisme, de rigueur historique, sans tomber dans le versant larmoyant. L'auteur aurait, par exemple, pu davantage développer la cachette de Tobias qui est présentée par la quatrième de couverture comme étant le fait majeur du livre alors qu'il n'occupe qu'une place restreinte dans celui-ci.

Que ce compte-rendu ne vous détourne pas de cette lecture ! L'histoire reste en elle-même agréable, même si certains aspects auraient pu être élagués alors que d'autres auraient pu être approfondis.

D'un coup d’œil, les plus, les moins.

+ L'ensemble des chapitres concernant Elsie qui reste un personnage auquel on s'attache.
+ L'aspect sensoriel : on s'imagine facilement dans la boulangerie familiale, immergée dans les odeurs gourmandes, admirant les petits pains savoureux et entendant la clochette retentir à chaque fois qu'un client passe la porte.
+ Un petit côté feel-good qui fait que la lecture reste agréable.

- Trop long.
- L'histoire de Reba est superflue et n'apporte rien à l'histoire.
- Le manque de profondeur de certains passages.

Dernières infos.

Un goût de cannelle et d'espoir a été publié en 2013 pour la version française et compte 491 pages.

Ma note.

dimanche 4 mars 2018

L'adversaire - Emmanuel Carrère

En résumé.


Nous sommes en Janvier 1993, Jean-Claude Romand tue froidement sa femme, ses deux enfants puis ses parents. Il tente ensuite de mettre le feu à sa maison, dans laquelle reposaient toujours les corps de sa famille, et avale plusieurs médicaments pour en finir à son tour. Seulement, les agents municipaux venus ramasser les ordures remarquent que la maison est en train de prendre feu et appellent les pompiers qui réussiront à sauver l'auteur des divers crimes. Ce dernier n'échappe pas à la prison. Ces faits sont le dénouement dramatique de 18 ans de mensonges pendant lesquels Jean-Claude Romand a fait croire à son entourage qu'il était médecin à l'Organisation Mondiale de la Santé, alors qu'il parcourait les aires d'autoroute et les forêts pendant ses journées de travail imaginées, tout en abusant de la confiance de ses proches pour les extorquer. Des mensonges qui avaient pris une telle ampleur que la seule issue possible était la mort.

Mon avis.

C'est une amie qui m'a mise en présence de ce livre et je l'en remercie vivement car j'ai apprécié la découverte, à la fois de l'histoire et de l'auteur. A la lecture du résumé, on peut facilement imaginer qu'on a affaire à une intrigue bien ficelée, bien construite et dont l'issue aurait mal tournée. Malheureusement, Emmanuel Carrère n'est pas l'auteur d'une fiction mais retrace ici un fait divers qui a défrayé la chronique à l'époque. Son projet est de rendre compte de ce drame tout en essayant d'imaginer les pensées de ce père de famille, capable de la pire des horreurs. Ainsi, la lecture est difficile à chroniquer car évidemment qu'on ne peut pas entrer en empathie avec le protagoniste de cette histoire macabre. Cependant, il y a deux choses à distinguer : les faits (ce qu'il s'est passé) du récit (comment l'auteur s'y est pris pour relater ces mêmes faits). C'est sur ce second point que vont porter mes ressentis.

Comme il l'écrit lui-même à plusieurs reprises, l'auteur tient une place particulière dans ce genre d'exercice. Emmanuel Carrère est entré en relation avec son personnage principal grâce aux courriers et au procès auquel il a assisté. Il lui a fallu sept ans pour réussir à coucher sur le papier ses impressions mais aussi pour parvenir à se situer par rapport à son désir d'écrire sur cette histoire. Cela peut en effet paraître un peu macabre, surtout que son intérêt pour Jean-Claude Romand contribue à l'inscrire dans les mémoires et le conforte dans son narcissisme. Il a donc abordé le sujet avec beaucoup de pincettes et il a su mettre de la distance entre son objet d'étude et lui. Il joue en quelque sorte le rôle du chirurgien qui autopsie son patient afin de trouver quels sont les  dysfonctionnements qui ont causé sa mort. Son point de vue tend à l'objectivité, même si on a comme l'impression qu'il finit par ressentir un certain attachement à Jean-Claude Romand, le rendant parfois victime au lieu de bourreau. Il faut dire qu'il a été victime de ses propres affabulations et on referme le livre sans véritablement savoir ce qui a pu déclencher en lui le tout premier mensonge, celui qui a enclenché la tombée des dominos. Lui-même ne le sait pas. J'ai trouvé que cette dimension d'analyse n'a pas été suffisamment exploitée. Finalement et bien que chaque élément soit replacé dans son contexte, on reste davantage sur du factuel, à savoir le déroulé des faits dans le temps que sur une analyse fine du caractère du meurtrier. C'est ce qui m'a manqué pour avoir un coup de cœur.

La plume de l'auteur est en revanche plus efficace quant il s'agit de romancer ou de thrilleriser l'intriguer. Même si on sent bien son point de vue qui apparaît souvent derrière le "je", on se croirait dans de la fiction tellement le rythme est prenant et l'écriture fluide, empreinte d'un lexique formel sans tomber dans le jargonneux. Il a fait en sorte qu'on se retrouve face à de vrais personnages, avec de vrais descriptions et mus par de vrais tourments, ce qui les rend attachants. Si cette affaire est si connue, c'est d'ailleurs parce qu'elle va chercher des choses bien cachées en nous. Bien qu'on sache déjà la fin avant de commencer le livre, on sent quand même une tension, un suspense qui nous conduisent à tourner les pages. Nous aussi, nous avons le même projet que l'auteur : nous avons envie de comprendre. J'ai été séduite par cette deuxième dimension du roman qui est celle du passage à l'écrit et à la narration des événements.

Si cette affaire vous interpelle, je vous conseille d'étancher votre curiosité avec ce livre, qui risque de ne pas vous combler sur le plan de l'analyse mais qui est bien écrit et construit !

D'un coup d’œil, les plus, les moins.

+ Le projet de l'auteur : partir d'un fait divers dramatique pour essayer de l'imaginer, de le comprendre et de le décrire.
+ La sincérité de l'auteur qui prend le soin d'expliquer la genèse du projet.
+ La description des faits réels nous entraîne sur le terrain de la fiction, avec de véritables péripéties et de véritables personnages.

- Manque d'analyse sur le personnage, la situation.

Dernières infos.

L'adversaire a été publié en 2000 et compte 220 pages.

Si vous souhaitez en savoir plus sur cette affaire, voici quelques références :
* L'adversaire est aussi un film, réalisé par Nicole Garcia et sorti en 2002 avec Daniel Auteuil, Géraldine Pailhas, Emmanuelle Devos et François Cluzet.
* Un second film, L'emploi du temps, est inspiré de l'histoire de Jean-Claude Romand et est sorti en 2001.
* Un épisode de Faites entrer l'accusé consacré à Jean-Claude Romand : https://www.youtube.com/watch?v=DN7IGyNmp4I
* Un épisode d'Affaires Sensibles sur France Inter - Six jours avec Jean-Claude Romand : https://www.franceinter.fr/emissions/affaires-sensibles/affaires-sensibles-18-septembre-2014

Ma note